Aucune question environnementale n’amène plus de questions à France et à moi que les plantes aquatiques.
Il y a une raison à cela. Il y une grande variété de plantes dans nos lacs et elles se déplacent constamment. Elles apparaissent une année, disparaissent l’année suivante et sont remplacés par une autre espèce. C’est un environnement très dynamique.
Prenez l’Utriculaire pourpre de l’Est. C’est une plante carnivore aquatique que l’on trouve dans des lacs en bonne santé de l’Est de l’Amérique du Nord. Ses petites et jolies fleurs de couleur pourpre fleurissent à la fin de l’été dans notre région. C’est différent en Floride ou au Texas où on en trouve aussi. Cette plante indigène hautement spécialisée se nourrit d’insectes et d’autres petits micro-organismes capturés dans son piège en forme de vessie.
À Dunany, on la trouve dans la baie à l’extrémité est du lac Black. Certaines années, ces plantes couvrent une grande superficie de la baie, comme c’est le cas en cet été 2024. D’autres fois, comme en 2020 et 2021, elle se font discrètes et n’occupe qu’une petite fraction de la surface de la baie.
Nous savons que les Utriculaires dépendent des courants d’eau, des activités humaines et animales pour la dispersion de ses graines et fragments. Depuis des années, on se demande pourquoi la couverture végétale de la baie varie autant d’une année à l’autre. Quels sont les moteurs de ce phénomène ?
Mais d’abord un peu d’histoire. À la mi-août 1981, une équipe du programme de technologie de la pêche et de la faune du Collège Vanier a réalisé un inventaire de la vie végétale et animale des lacs Boyd et Black. On m’a remis une copie du rapport publié l’année suivante. Fait intéressant, il n’y a aucune mention de l’Utriculaire pourpre.
Le cycle de croissance de l’Utriculaire pourpre est une adaptation hautement spécialisée à son environnement aquatique, lui permettant de survivre dans des conditions difficiles et de se reproduire avec succès dans des habitats pauvres en nutriments.
Nous disposons de données montrant que le lac Black est en bonne santé et, par conséquent, pauvre en nutriments.
Mes recherches m’amènent à la conclusion suivante :
- Le climat est le principal moteur des changements que nous avons observés, notamment la température et l’humidité.
- Une eau plus chaude combinée à une humidité élevée, en particulier à de fortes pluies, stimulent l’expansion de la plante.
- Évidemment, à l’inverse, une eau plus froide combinée à un temps sec aura l’effet contraire.
Il y a quelques années, j’ai consulté l’un des spécialistes des lacs les plus reconnus au Québec, le professeur Richard Carignan PhD. qui a visité le lac Black et a même réalisé une brève vidéo (2,5 minutes) du monde sous-marin dans la baie que vous pouvez visionner ici.
Son conseil. Ne faites rien. Vous pouvez facilement faire plus de mal que de bien.
Il existe d’autres lacs au Québec où l’on trouve l’Utriculaire pourpre: les lacs Édouard, Traverse, aux Jésuites, du Chevreuil, Galipault, St-Pierre, des Deux Montagnes en sont quelques-uns. On en trouve aussi dans plusieurs lacs des parcs provinciaux ainsi que de la région de l’Outaouais. Cependant, il n’existe pas de liste complète et les informations spécifiques dont nous disposons sur le lac Black font défaut.
En fin de compte, la température, les précipitations, surtout celles qui sont abondantes, et les changements saisonniers ont un impact sur le cycle de croissance des Utriculaires. Les changements climatiques qui nous amènent des évènements extrêmes nous réservent peut-être des surprises.
Pour le meilleur et pour le pire, nous devons nous adapter!